Dans la perspective de son 25e numéro à paraître en mars 2024, la revue Alternatives Humanitaires lance un appel à contributions pour son dossier qui sera consacré au thème dont le titre provisoire est « Crise alimentaire mondiale : ses contours et le rôle que les acteurs humanitaires peuvent jouer ». Si vous êtes intervenant·e, chercheur·euse ou observateur·ice du milieu humanitaire international, et souhaitez soumettre un projet d’article sur ce thème, merci d’adresser un résumé de votre problématique et un plan provisoire (2 pages maximum) avant le 30 octobre 2023, à l’adresse mail suivante : contact@alternatives-humanitaires.org. La réponse vous sera adressée le 2 novembre 2023 au plus tard. Veuillez noter que la date limite pour soumettre un projet d’article a été repoussée au 13 novembre 2023.
L’article final – rédigé en français ou en anglais – devra être rendu le 24 janvier 2024, le calibrage moyen se situant aux alentours de 15 000 signes, espaces compris (soit 2 400 mots environ). Six ou sept articles environ seront retenus dans le cadre de ce dossier.
Pour chaque numéro, nous étudions également les projets d’articles portant sur des thématiques en relation avec l’action humanitaire autres que celle du dossier, et qui trouvent place dans les rubriques « Perspectives », « Transitions », « Innovations », « Éthique », « Reportage » ou « Tribune ». Nous vous invitons à nous faire parvenir vos propositions.
Crise alimentaire mondiale :
ses contours et le rôle que les acteurs humanitaires peuvent jouer
Un dossier/focus copiloté par Stéphanie Stern – Chef du projet ACF Knowledge Lab, Action contre la Faim – France
et Frédéric Mousseau – Directeur politique de l’Oakland Institute (https://www.oaklandinstitute.org), en charge de la recherche et des activités de plaidoyer sur l’investissement foncier, la sécurité alimentaire et l’agriculture
avec Boris Martin, rédacteur en chef
Depuis cinq ans, la faim est repartie à la hausse et les crises alimentaires se multiplient. En 2022, 828 millions de personnes souffraient de la faim dans le monde, soit 46 millions de plus qu’un an auparavant. D’après le dernier rapport mondial sur les crises alimentaires (Programme alimentaire mondial, 2023), on dénombrait 58 crises alimentaires dans le monde en 2022 et 258 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire aigüe, c’est-à-dire en incapacité d’accéder physiquement et économiquement à une nourriture suffisante, saine et nutritive. La sous-nutrition, qui implique un retard de croissance, une malnutrition aigüe et des carences multiples, demeure la cause de près de la moitié des décès des enfants de moins de cinq ans dans le monde. En dehors même des situations de crise aigüe, 3 milliards de personnes n’ont pas accès à un régime alimentaire sain. La crise alimentaire, autrefois triste apanage des pays pauvres ou en guerre, touche désormais les pays industrialisés. à titre d’exemple, 16 % des Français déclarent ne pas manger à leur faim (Crédoc, 2023) et 26 millions d’Américains souffraient de la faim en 2020 (Bureau de recensement américain).
Les causes des crises alimentaires sont largement identifiées : l’impact des conflits, souvent prolongés, qui affectent aujourd’hui avant tout les populations civiles ; la montée des inégalités socio-économiques aggravées par la pandémie de Covid-19 ; les effets des crises climatiques et environnementales ; et la défaillance des gouvernances locales, nationales et globales à y faire face. Le conflit en Ukraine, les chocs économiques et l’inflation qui ont suivi, ou encore le triste record de la pire sécheresse enregistrée dans la Corne de l’Afrique en 40 ans, sont une tragique illustration de cette combinaison de facteurs.
La faim dans le monde n’est pourtant pas une fatalité : elle témoigne avant tout d’un manque de priorisation politique. Face à des causes multiples, il n’existe évidemment pas de solution unique et l’on ne peut que se ranger du côté de ceux qui demandent aux États d’initier des changements profonds et réellement transformateurs des systèmes. Cela implique une véritable mis en cohérence des politiques publiques dans le sens d’un accès aux services publics pour toutes et tous, une transformation agroécologique des systèmes alimentaires et l’arrêt des politiques ayant un impact néfaste.
L’objectif de ce nouveau numéro n’est pas d’ajouter à l’indispensable plaidoyer déjà largement porté par d’autres pour interpeller les politiques et les acteurs économiques comme financiers. Il s’agit de se demander ce que les acteurs humanitaires observent, inventent et avancent pour participer, à leur échelle, à cette lutte globale. Dans cette équation complexe entre chocs climatiques, crises géopolitiques, défaillance des systèmes économiques et politiques, quelle est en effet leur plus-value ? À côté des moyens devant être donnés et consolidés pour les réponses aux urgences, quels changements les organisations non gouvernementales et les agences humanitaires ont-elles initié dans leurs pratiques qui leur donnent une expertise incontournable ? Que peuvent encore mettre en œuvre ces acteurs pour faire avancer la lutte contre la faim et les crises alimentaires ? Quel peut et doit être leur rôle spécifique pour questionner nos modèles de sociétés et transformer les systèmes, tout en étant complémentaires des autres acteurs impliqués ? Du fait de leur place à l’intersection du « terrain » et des « décideurs », sont-ils à même, notamment, de soutenir la participation systématique des sociétés civiles et des communautés, dans toute leur diversité, à la co-construction des politiques publiques, à l’échelle locale, nationale, régionale et internationale. De par leur poids réputationnel, sont-ils appelés à prendre position vis-à-vis de l’agriculture intensive et du système agro-industriel de production, de l’instabilité des prix des denrées alimentaires et des pratiques spéculatives, ou cela excède-t-il leur mandat et leurs capacités ?
Si ces questions instaurent le « périmètre » de ce numéro, elles n’épuisent pas celles – innovantes et négligées – que les auteurs et autrices pourront nous soumettre.
