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Sous un soleil rouge, un canot pneumatique surchargé de réfugiés syriens à la dérive sur la mer Égée entre la Turquie et la Grèce après la panne de son moteur sur au large de l’île grecque de Kos, le 11 août 2015. Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a appelé la Grèce à reprendre le contrôle du « chaos total » sur les îles méditerranéennes, où des milliers de migrants sont arrivés. Selon Vincent Cochetel, directeur du HCR pour l’Europe, environ 124 000 personnes sont arrivées cette année par la mer, dont beaucoup via la Turquie…

Avec cette photo de Yannis Behrakis en couverture de ce numéro, nous souhaitons évoquer autant la réalité des migrants qui risquent et perdent encore leur vie en Méditerranée que cette soi-disant alliance de l’homme et de la nature, largement fissurée depuis que le premier a manifestement décidé de soumettre cette dernière à tous ses excès. Dans cette photo, l’homme et la nature se côtoient. Le soleil magnifique darde ses derniers rayons d’un jour sur les eaux de la mer Égée comme s’il ne devait jamais cesser ce rituel. Pour un peu, on croirait l’innocent spectacle d’un coucher de soleil dont rêvent tous les amoureux. C’est presque oublier la frêle embarcation ponctuée de quelques êtres humains se demandant, peut-être, ce qu’ils ont fait pour détester ce spectacle que, comme tout le monde, ils ont un jour vénéré. Dialogue muet entre l’astre solaire et les damnés de la Terre. Étrange huis-clos à peine fracturé par l’appareil d’un grand photographe grec, mort à l’âge de 58 ans, en mars dernier, Yannis Berhakis. Nous souhaitons ainsi rendre hommage à ce photographe qui, durant toute sa carrière, fit tout pour montrer au monde des hommes ce qu’il infligeait à ses contemporains, ce qu’il s’infligeait lui-même. Dans un entretien qu’il avait accordé en 2016 à nos collègues de la délégation du CICR à Paris (https://www.youtube.com/watch?v=k9aQ5CBVoZ8&t=7s), le photographe était revenu sur l’histoire de cette grand-mère, la sienne, chassée d’Izmir par les Turcs lors de la « grande catastrophe » de 1922. Réfugiée à Marseille, en France, elle ne retrouva ses enfants qu’au bout de deux ans grâce aux services des recherches des Croix-Rouge française et hellénique avec l’appui du CICR. Né de cette histoire, Yannis n’oublia jamais. Et c’est lui qui, un jour de 2015, pressa sur le bouton pour immortaliser ces réfugiés des temps modernes, regroupés sur une embarcation dérivant entre la Turquie et la Grèce…

Boris Martin

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