Au plus près des bénéficiaires, les bénévoles de la Croix-Rouge française se sont engagés au risque de leur santé physique et mentale. Comment ont-ils géré cette situation exceptionnelle qui impactait autant leur engagement que les habituelles méthodes de management ? C’est à ces questions que l’autrice, s’appuyant sur une étude financée par la Fondation Croix-Rouge française, répond.
Au lendemain de la première vague épidémique de mars 2020, les équipes de bénévoles de la Croix-Rouge française (CRF) en charge de la modélisation et de la mise en œuvre des activités d’urgence ont vu s’étendre leur domaine d’action. Ces dernières ont en effet dû rapidement s’inscrire dans des réalités et des enjeux institutionnels, organisationnels et sanitaires très disparates, notamment entre la ville de Marseille et la Guyane, terrains retenus pour notre étude[1]« Les déterminants du bien-être psychosocial des bénévoles Croix-Rouge en contexte épidémique : perceptions des facteurs de stress, du risque et stratégies de coping mobilisées dans le … Continue reading. Derrière ces activités dites « de riposte », se trouvent des hommes et des femmes bénévoles mobilisés en urgence devant trois injonctions fondamentales : prendre soin de soi, de l’autre, et du collectif. Comment les aidants se sont-ils entraidés quand une fatigue émotionnelle touchait un pair et/ou l’ensemble d’une équipe ? Comment sont-ils parvenus à (re)fonder un collectif d’aidants dans un contexte anxiogène ?
À travers des extraits d’entretiens réalisés auprès de vingt-et-un bénévoles dans le cadre de cette étude socio-anthropologique[2]Cette recherche a été réalisée dans le cadre de l’appel à bourses postdoctorales lancé par la Fondation Croix-Rouge française et avec le soutien de ses partenaires, le SESSTIM (Sciences … Continue reading, cet article traitera dans une première partie des comportements spontanés de sociabilité[3]Nous nous référons ici à une « sociabilité organisationnelle intégratrice » telle qu’analysée par Guillaume Coton dans son article « La sociabilité comme moyen de l’action collective, … Continue reading, de mutualisme et d’entraide. De là, des dynamiques sont nées de l’expérience collective d’un terrain humanitaire « du proche ». Dans un second temps, nous remettrons en lien l’analyse de cette recherche de soutien social au sein d’une « communauté symbolique humaniste » dans un contexte inédit où il fallait recréer de l’ordinaire, de la vie pour ne pas céder à la peur, à la perte de sens et à la division au sein des équipes. En effet, les bénévoles ont été confrontés à des facteurs de risque personnels, interpersonnels, organisationnels et familiaux qui pouvaient impacter rapidement leur santé (notamment mentale) et les dynamiques de groupe. En conclusion, nous verrons que les méthodes de management en situation d’urgence pandémique ont dû trouver un équilibre entre des mesures de gestion du risque sanitaire, d’une part, et les mesures de gestion des affects, d’autre part. Le soutien psychosocial aux aidants bénévoles et le renforcement des liens tissés entre les aidants restent un enjeu majeur durant cette pandémie pour les responsables d’interventions humanitaires en charge de collectifs de bénévoles.
Méthodologie
Cet article s’appuie sur vingt-et-un entretiens individuels réalisés avec onze personnes de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) et dix personnes basées en Guyane. Une sélection des participants à l’étude a été réalisée selon la méthode dite par « boule de neige » avec l’aide des responsables des cellules opérationnelles et techniques des délégations territoriales de PACA et de la Guyane. En raison des confinements et des restrictions de déplacements hors métropole, une immersion au sein de l’espace social et humanitaire, c’est-à-dire au « monde » (institutionnel, social, culturel, politique et intime) des répondants n’a pas été possible. Ceci a constitué une contrainte majeure pour à la fois construire une relation de confiance avec les enquêtés, et saisir « de l’intérieur » les sources de stress et les aspects socio-affectifs décrits durant les entretiens. Cependant, les participants – souvent débordés et épuisés – ont libéré une parole d’une force et d’une authenticité incroyables.
Les bénévoles ont eu recours – de façon consciente ou non – à des stratégies d’adaptation
Le souci de l’Autre : sociabilités, mutualisme, entraide
La pandémie de Covid-19 a majoré les vulnérabilités sociales, sanitaires, économiques et psychologiques de groupes de personnes en situation de précarité, récipiendaires des projets des associations de solidarité[4]Voir le Rapport annuel n° 26 de la Fondation Abbé Pierre sur l’état du mal-logement en France 2021, notamment sa partie I, Double peine et bombe à retardement : les mal-logés face au choc du … Continue reading. Dans ce contexte, les opérateurs du champ de la solidarité et de l’aide humanitaire ont dû faire face à des défis de taille tels que l’aggravation, la modification des besoins sociaux, en santé, des situations de famine, l’instauration de modes opérationnels inédits et l’adoption de nouvelles pratiques de soin (parfois en distanciel). Face à ces sources de stress, les bénévoles ont eu recours – de façon consciente ou non – à des stratégies d’adaptation (dites de coping[5]Aussi appelés stratégies de gestion du stress, les mécanismes de coping sont des réponses comportementales, émotionnelles et cognitives des individus confrontés à des situations négatives … Continue reading) soit pour résoudre des problèmes (individuels ou collectifs), soit pour réguler des émotions.
Parmi les mécanismes relatés par les bénévoles et consistant à préserver le bien-être de ses pairs et du groupe lorsque des doutes et un épuisement sont apparus les premières semaines d’avril 2020, nous avons retrouvé les suivants : recourir à des pairs quand on se sent seul ou épuisé, ou bénéficier – sans que parfois n’ait émergé une demande – de conseils et/ou d’un soutien émotionnel de ses pairs.
« On se donne des coups de fil si l’on sent que l’autre ne va pas terrible… On est une belle équipe, on peut compter les uns sur les autres. On a des liens sociaux très très forts. » (bénévole du dispositif « La Croix-Rouge chez vous », Marseille)
Une proximité existait souvent en amont avec la ou les personnes identifiées comme « aidants ». Ceci, en raison d’un lien de mentorat ou d’amitié établi entre, d’une part, des bénévoles en recherche d’aide et d’une écoute et, d’autre part, les « figures d’aidants ». Ces derniers ont des caractéristiques de « bon écoutant » : présents (à distance ou physiquement), ayant une disponibilité émotionnelle (écoute) connue et appréciée, et occupant un statut social reconnu au sein de la délégation. Ceci explique en partie le non-recours des bénévoles interrogés à des psychologues du centre opérationnel de la CRF (ligne d’écoute, groupes d’échanges par visioconférence). Parmi ces figures d’écoutants, sont évoqués le médecin, l’infirmier, « les Anciens » (« des gens expérimentés » de la CRF engagés depuis plusieurs années).
« On n’a pas de psy, mais un médecin référent pour les pompiers, marins-pompiers bénévoles. Moi, je le connais depuis que je suis gamine et si besoin, j’irai le voir direct ! Ou alors un infirmier si j’ai un problème psy. Il y a aussi le directeur des opérations, qui est un ancien, un médecin. Ce n’est pas un psy, mais j’ai confiance. Il y a beaucoup de gens expérimentés et il n’y a pas besoin de psy. Les bénévoles font du soutien psy par eux-mêmes sans s’en rendre compte. » (bénévole femme, 22 ans, Marseille)
Des dynamiques d’auto-support à distance sont nées quand la déstructuration puis la restructuration des activités ont demandé un investissement bénévole important et ont ébranlé les dynamiques d’équipe.
« Les réunions Zoom permettent de voir les visages, expressions, cerner les humeurs des collègues par leur voix et les discours tenus. On fait tout de même attention aux uns et aux autres, via nos écrans. » (bénévole homme, 70 ans, Marseille)
« On veille réciproquement à ce que l’autre ne soit pas débordé. Plusieurs fois l’équipe m’a dit : “Enfin, tu prends un break !” » (bénévole femme, 48 ans, Marseille)
Ces nouvelles sociabilités ont été au cœur de dynamiques relationnelles au sein des « collectifs » bénévoles, notamment marseillais, qui se sont spontanément formés entre fin mars et avril 2020. Dans ce contexte singulier des interventions d’urgence, cela aurait permis d’organiser la rencontre, de soutenir le lien social à des moments-clés, pour que les individus qui composent ces nouveaux collectifs se sentent bien.
« Via les : on aime faire des apéros à la fin des Zoom, on est humain. Il y a des liens, forts, qui se sont noués, même à distance. On fait très très attention aux uns et aux autres. Mais rien n’est plus instable et aléatoire que ce mode de fonctionnement. » (bénévole femme, 55 ans, Marseille)
La « communauté émotionnelle » se caractériserait en effet par « un aspect éphémère, une “composition changeante”, une inscription locale, l’absence d’une organisation et la structuration quotidienne »[6]Michel Maffesoli, Le temps des tribus, 2020, p. 123.. Labiles, les dynamiques d’auto-support ont émergé quand des facteurs organisationnels (modes opératoires, mesures sanitaires, etc.) comme environnementaux (précarité sociale, stigmates des proches, etc.) ont fragilisé les liens. L’« assemblage » qu’est un collectif tiendrait en effet à un fragile équilibre, instable, d’une « charpente » nécessaire, mais assez souple pour permettre le mouvement interne du collectif[7]David Vercauteren, Micropolitiques des groupes. Pour une écologie des pratiques collectives, Les Prairies ordinaires, 2011.. Une instabilité s’est notamment ressentie en Guyane, suite à l’application de certaines mesures sanitaires, ou encore suite à une précarisation brusque des conditions de certains bénévoles (surtout ceux en situation d’exil). Une bénévole de 26 ans en charge d’équipes en Guyane témoigne :
« Certains bénévoles ont décidé clairement de se mettre en retrait du groupe par rapport à cette question des masques. Il fallait faire beaucoup de pédagogie avec eux, leur donner des explications. »
« Ils ont tous une forte capacité de résilience, de façon différente, même chez les plus précaires. Ils ne mangent pas tous les jours, sont illégaux, etc., et donc ne viennent parfois plus du jour au lendemain. On devait les soutenir, encore plus que les autres . »
« Les hommes ont besoin les uns des autres pour satisfaire des aspirations affectives », écrit le sociologue Serge Paugam[8]Serge Paugam, Le lien social, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2008, p. 28-29., spécialiste des formes contemporaines de solidarité, pour décrire les liens d’interdépendance entre les individus. Ces liens tels que les « liens de participation élective » (des relations affinitaires entre amis, pairs, au sein d’associations, de communautés) et des « liens de participation organique » (monde du travail) assurent une reconnaissance et une protection (rapprochée ou contractualisée)[9]Idem..
Le sentiment d’appartenance à une communauté symbolique humaniste
« On ne naît pas groupe, on le devient », selon le sociologue David Vercauteren[10]David Vercauteren, Micropolitiques des groupes…, op. cit., p. 3. À partir de cette affirmation, nous avons regardé « l’action à plusieurs » à partir de processus internes qui sont vivants, où le pouvoir, les désirs de changement, les besoins individuels et collectifs circulent et construisent une expérience singulière du faire en commun, de faire « communauté ». L’engagement bénévole au détour de la crise a été motivé par la forme de socialisation primaire (l’« hors de soi », donc l’ouverture sur le monde) et d’un retour au sentiment d’appartenance qu’il apporte. A fortiori dans un contexte de confinement et d’isolement…
« On ne vient pas à la CRF pour rien. Les populations haïtienne et brésilienne pensent qu’être à la CRF, ça peut les aider dans les démarches administratives. Mais c’est surtout pour se rencontrer entre bénévoles, créer du lien social. Cela leur permet de s’épanouir et d’acquérir des savoirs, des connaissances, et de trouver sa place dans un groupe, d’être reconnus. » (bénévole homme, 41 ans, Guyane)
Nous avons noté dans les discours de bénévoles que s’engager dans des réseaux de sociabilités et des actions conformes à un système de valeurs humanistes a aussi répondu, pour certains d’entre eux, à une finalité morale et altruiste. Cela s’est révélé pourvoyeur de sens[11]Bénédicte Havard-Duclos et Sandrine Nicourd, Pourquoi s’engager ? Bénévoles et militants dans les associations de solidarité, Payot, 2005, p. 113. tout en facilitant une prise de conscience de la capacité d’agir, ensemble, sur le monde, à son échelle locale. « Une société est avant tout l’idée qu’elle se fait d’elle-même », disait Durkheim. La conscience collective, l’adhésion à des normes sociales, symboles, valeurs morales (l’univers humaniste du mouvement de la Croix-Rouge) ont soutenu un sentiment d’appartenance. Cette dimension symbolique de la vie sociale[12]Émile Durkheim, Les formes élémentaires de la vie religieuse, Presses Universitaires de France, 2003, 5e édition., certains bénévoles avouèrent ne plus la trouver au travail, avant et pendant le premier confinement[13]Voir à ce sujet Évelyne Josse, « Le brown-out, un syndrome professionnel de perte de sens révélé par la crise du COVID-19 », Résilience Psy, 2020, … Continue reading.
« Ça m’a fait du bien d’être bénévole à 150 %, car j’étais au chômage avant le confinement et ne trouvais plus de sens à mon quotidien, et… d’humanité au travail ! » (bénévole femme, 55 ans, Marseille)
« Après 45 ans de bénévolat à la CRF, je peux vous assurer que beaucoup de gens aiment aider, mobilisent des valeurs, le principe de solidarité, d’humanité, etc. ; ça joue beaucoup sur la résilience de la communauté CRF dans son ensemble, et encore plus dans cette crise sanitaire ! » (bénévole homme, 63 ans)
Dans un « processus de socialisation humanitaire »[14]Isabelle Parizot, « La prise en charge des malades démunis : entre univers médical et univers humaniste », in Serge Paugam, Repenser la solidarité, 2011, p. 747-763., les acteurs se seraient liés autour d’un certain « ethos humanitaire »[15]En référence aux valeurs comme la charité, la compassion, la clémence, le respect de la vie humaine et de la dignité et aux principes fondamentaux qui comprennent également les principes … Continue reading, venu renforcer ou créer un sentiment d’appartenance à une communauté CRF existant avant le déclenchement des interventions d’urgence Covid-19.
« Il y a eu quelques conflits interpersonnels, du fait de visions différentes que je vois depuis 21 ans de bénévolat à la CRF . Mais la synergie, la symbiose ont été plus fortes. Les conflits ont été gommés, car nous nous sommes centrés sur les objectifs communs et des principes humanitaires partagés ! On a créé une vraie communauté, au niveau des unités locales, au niveau du département et par les réunions quotidiennes, et il n’y avait pas de tensions. » (bénévole homme, 38 ans, Marseille)
« C’est très frustrant de voir cette misère, on se sent impuissant. , la passion d’aider, on partageait cette valeur, les bénévoles. » (bénévole homme, 34 ans, Guyane)
Ce processus permet aussi la perception de complicités et réciprocités naissantes au sein d’une « famille » :
« Il y a une vie qui est née, qui n’existait pas avant. On est une famille. » (bénévole femme, 55 ans, Marseille)
« Les gens à la CRF sont incroyables, je me sens apprécié, utile et soutenu. Je fais partie d’une famille. Faire partie de la CRF et de Médecins du Monde, c’est une motivation pour moi. » (bénévole homme, 34 ans, Guyane)
Le management des risques d’épuisement et de démobilisation des bénévoles
Dans ce que l’on pourrait appeler « l’enchantement du dévouement », observé au sein des équipes bénévoles au début de la période de riposte à la crise, l’arbitrage des risques socio-affectifs, couplé à celui des risques sanitaires, s’est imposé aux responsables d’équipes bénévoles. Par exemple, la mesure d’éloignement des séniors (bénévoles de plus de 65 ans) a empêché ces derniers de « goûter » à l’effervescence collective, ce qui a immédiatement généré des comportements et des émotions de type « réactionnel » (opposition, fuite, colère induite par un sentiment de rejet, incompréhension).
« On nous a mis sur la touche, à l’écart. Cela a généré un sentiment très fort de rejet et d’isolement social du type “On a plus de 65 ans et la CRF nous considère comme inutiles, trop vieux ! ” » (bénévole femme, 73 ans, Marseille)
Parce que la participation aux activités d’urgence avait jusqu’ici contribué au bien-être social et émotionnel de certains bénévoles séniors, le critère de l’âge retenu comme facteur de risque premier par la direction a été perçu comme « un facteur d’exclusion de la communauté Croix-Rouge ».
« Ils étaient prêts à prendre des risques pour eux-mêmes, quand ils ne disaient pas être inquiets d’infecter un proche ! Vous comprenez, la CRF c’est leur vie ! Ils mettent leur engagement au-dessus de leur santé physique. Ça leur apporte plus que ce que l’on croit. Certains, très vexés, ont décidé de partir définitivement de la CRF » (bénévole femme, 64 ans, Marseille)
Au-delà des séniors, une fatigue d’usure a touché tous les bénévoles interrogés. Les managers n’ont pas toujours mis en relation une dégradation du bien-être psychosocial ressentie au sein des équipes avec une conjonction de plusieurs facteurs de stress perçus (aux niveaux individuel, interpersonnel, organisationnel, communautaire, et à une échelle plus large de santé publique nationale). Au niveau organisationnel, la charge de travail, le niveau de responsabilité, des mesures de protection contraignantes, l’organisation du travail sanitaire et social selon des modalités d’intervention opérationnelles inédites, ou encore un style de management descendant, ont déstabilisé les bénévoles. Des injonctions relatives à une rhétorique de l’urgence ont pu causer des distorsions d’ordre éthique. Par exemple, pour les bénévoles engagés dans l’action sociale de proximité (épicerie solidaire, maraudes, etc.), la pandémie aurait accéléré une « technicisation du care » (par exemple le dispositif « Croix-Rouge chez vous »[16]« Covid-19 : Croix-Rouge chez vous – Maintenir le lien social des personnes vulnérables isolées », 20 mars 2020, … Continue reading). En effet, la riposte au Covid-19 aurait révélé à la fois des « cultures d’organisation » différentes (style managérial, compétences techniques) et une tension entre deux logiques d’intervention : celle de l’expertise (de la rationalité managériale ou entrepreneuriale) en situation d’urgence, d’une part, et celle de l’action sociale à base communautaire (forme de survivance des modalités anciennes d’action collectives), bastion d’une « niche identitaire Croix-Rouge », d’autre part.
« Parce qu’il fallait optimiser, rentabiliser, il fallait donc couper le lien humain… Il y a eu en ce sens une déshumanisation de l’aide, je trouve. » (bénévole femme, 73 ans, Marseille)
Notre étude a démontré que les délégations locales et leurs unités constituent un corps vivant dynamique, s’adaptant aux transformations profondes amenées par le déclenchement des interventions de riposte à la pandémie Covid-19. Dans des équipes dont des membres avaient des liens moins étroits, harmonieux et intangibles que d’autres équipes, le management des affects a consisté à prendre soin de ces liens entre pairs pour dépasser des fractures (générationnelle, socio-culturelle, etc.). Et ce, pour refaire « communauté » comme l’exprime cette jeune bénévole de Guyane.
« Il faut refaire . On essaie de penser à “l’après”, la sortie du Covid, pour réunir les anciens et les nouveaux ».
Les délégations locales et leurs unités constituent un corps vivant dynamique, s’adaptant aux transformations profondes
Cette approche « par le bas » a voulu donner une épaisseur socio-affective à une catégorie d’acteurs souvent invisibles, et a souhaité souligner leurs « tours de main » quand il a fallu préserver un état de bien-être physique, mental et social pour soi-même, ses pairs et plus largement pour la « communauté CRF ». Cette étude a permis également de mettre en exergue la façon dont la prise en charge des vulnérabilités par les bénévoles a pu, elle-même, devenir une expérience vulnérabilisante sur le plan psychosocial. Face à la détresse d’autrui et des interventions de première ligne d’urgence imparfaites, la supervision en groupe permettrait de soutenir les stratégies d’adaptation[17]Voir les outils du Centre de Référence pour le soutien psychosocial de la Fédération internationale de la Croix-Rouge : Supervision de soutien pendant la Covid-19, mai 2020, … Continue reading autour de situations spécifiques, mais également autour des difficultés éthiques de prendre soin des publics de façon matricielle tout en étant aussi attentif aux liens d’entraide mutuelle entre les aidants bénévoles.
Les propos et opinions exprimés dans cet article n’engagent que son auteure et ne reflètent pas nécessairement ceux de la Fondation Croix-Rouge française.
ISBN de l’article (HTML) : 978-2-37704-859-5