Le secteur Santé mentale et soutien psychosocial est largement tombé sous la coupe de la logique néolibérale en déclinant ses concepts et ses standards. Emporté dans un double mouvement d’uniformisation et d’expansion, il doit intégrer d’autres méthodes et pratiques permettant aux individus de se relever.
Le secteur Santé mentale et soutien psychosocial est largement tombé sous la coupe de la logique néolibérale en déclinant ses concepts et ses standards. Emporté dans un double mouvement d’uniformisation et d’expansion, il doit intégrer d’autres méthodes et pratiques permettant aux individus de se relever.
Dans de nombreuses régions du monde, le parcours de soins en santé mentale constitue un véritable métissage thérapeutique, au sens que donnent François Laplantine et Alexis Nouss[1]François Laplantine et Alexis Nouss, Le métissage, Téraèdre, Coll. Réédition, 2011. à la notion de métissage, soit le produit d’un assemblage et d’une articulation qui parviennent à enchevêtrer des éléments différents en les transformant sans les dissoudre. Centres de santé mentale communautaires, institutions psychiatriques, guérisseurs traditionnels, devins ou diverses thérapies encadrées par des pratiques religieuses (cultes musulmans, exorcismes catholiques, camps de prière pentecôtistes…), ou encore associations de personnes concernées revendiquant leur droit à vivre sans traitement pharmacologique, professionnels libéraux pratiquant des psychothérapies dites « brèves et évolutives », etc. Nous pouvons ainsi observer une myriade de leviers soignants, culturels et sociaux présents dans l’environnement des personnes en situation de trouble[2]Le travail doctoral en cours de Marie Viviane Goupougouni Leni consiste à analyser les processus de réhabilitation psychosociale présents dans les différentes formes de thérapies traditionnelles … Continue reading. Dans ce contexte, les organisations non gouvernementales internationales (ONGI) sont amenées à repenser la manière dont elles peuvent concevoir la réponse humanitaire, notamment en collaborant mieux avec l’ensemble des acteurs locaux, organisations de la société civile ou institutions publiques locales. Dans le champ de la santé mentale, comme dans d’autres, ces partenaires expriment en effet une volonté croissante d’autonomie dans la gestion des actions qui les concernent. Depuis le Sommet humanitaire mondial de 2016, les ONGI appellent ce besoin de transformation de la posture partenariale « l’agenda de la localisation de l’aide humanitaire »
Localisation versus spécificités
Dans le secteur « Santé mentale et soutien psychosocial », communément appelé par son acronyme SMSPS, la question de la « localisation de l’aide » n’est pas évidente. Le constat est partagé : depuis une vingtaine d’années, les problèmes posés en termes de santé mentale ne sont pas seulement des problèmes spécialisés de psychiatrie ou de psychologie, mais relèvent également de problèmes généraux de la vie sociale qu’ils traversent de part en part.
Les pratiques de SMSPS prêtant attention à ces problèmes deviennent ainsile théâtre d’innovations, véritable laboratoire des alternatives humanitaires où des initiatives locales s’expérimentent en différents lieux. Ces pratiques entrent dans le cadre classique de logiques de prévention ou de soins de troubles mentaux. Mais nous les retrouvons aussi, et de plus en plus, dans des projets de cohésion sociale, voire de maintien de la paix, de préparation aux risques de désastres climatiques, de violences liées au genre, à l’âge, au handicap, etc. Les activités déployées sont tout aussi variées. Ainsi, dans le cadre de projets dits de « santé mentale communautaire », les ONGI accompagnent de nombreux groupes de personnes qui souhaitent « se soigner » à travers une mise en commun de leurs préoccupations individuelles, dans la concrétisation de projets qu’ils souhaitent mettre en œuvre pour et avec leur communauté. Il s’agit souvent de projets générateurs de revenus, tels que la mise en place d’une plantation de fruits et légumes, d’un cybercafé ou d’une troupe de théâtre. En suivant les projets des personnes qu’elles accompagnent, ces ONGI cherchent à faire face aux processus dissociatifs du traumatisme[3]La dissociation traumatique est un mécanisme de défense du psychisme lorsqu’il est confronté à un événement traumatique extrême. Il entraîne une absence de désir, des amnésies, des pertes … Continue reading et à activer des processus de rétablissement et de conscientisation (travail sur le deuil et la perte, sur la gestion des émotions, le pardon et la réconciliation, la culpabilité, la honte, le projet de vie, les ressources individuelles et communautaires…). Ces pratiques de santé mentale sont expérimentées par de nombreuses équipes mobiles, parfois composées de non-spécialistes tant la présence de « psys » est plutôt rare dans les pays d’intervention.
Au risque d’une expansion sans limite
En plaçant sous sa bannière une diversité de troubles, de pratiques et d’acteurs, la SMSPS est ainsi devenue l’affaire de tous, mais aussi, paradoxalement, la responsabilité de personne. L’agenda de la localisation de l’aide humanitaire se heurte alors à un point de butée important qui traverse actuellement le secteur SMSPS : son expansion. Sans positionnement clair sur la question des acteurs en SMSPS et de la localisation de l’aide, le risque est grand de voir émerger une conception expansive de la santé mentale, sans limite, sans noyau dur ni population cible, faisant de l’humain un capital, et qui serait essentiellement centrée sur la responsabilité individuelle. Les catégories de bien-être, de bonheur ou de résilience – largement plébiscitées par les ONGI ces dernières années – sont devenues les vecteurs performatifs d’une telle expansion.
Penser la question de la localisation permet ainsi de s’interroger de nouveau sur les « acteurs » en SMSPS. Qui sont-ils ? Qui porte la responsabilité sociétale de définir ce que constitue le bien-être ou la bonne santé mentale d’un individu ou d’une communauté ? Est-ce le ministère de la Santé, des Affaires sociales, de la Justice ou de l’Intérieur ? Ou des scientifiques promoteurs de données probantes et dont les recherches sont parfois financées par des grands laboratoires pharmaceutiques, voire également par de grandes agences d’aide au développement ? Ou bien des spécialistes, psychiatres ou psychologues trop souvent « chapellisés » dans leurs théories cliniques de référence ? Ou encore des personnes concernées (mais par quoi ?), des tradithérapeutes et devins, des religieux gestionnaires de centres spécialisés, des prophètes responsables de lieux de prière et de guérison, des militants issus d’association de défense des droits ?
La colonialité de la santé mentale
Pour comprendre le sens politique de cette expansion de la santé mentale, il nous semble aujourd’hui indispensable de mobiliser le concept de « colonialité » tel que problématisé par Anibal Quijano[4]Aníbal Quijano, “Coloniality and Modernity/Rationality”, Cultural Studies, vol. 21, no. 2–3, 2007, pp. 168–178.. L’auteur vise, à travers ce concept, une opération épistémique qui agence l’ensemble de nos rapports au monde. La colonialité désigne un régime de pouvoir qui a généralement survécu au colonialisme et qui crée de nouvelles identités sociales et culturelles, en catégorisant et classant la population selon un prisme qui hiérarchise la valeur des vies humaines. Nous pouvons, par exemple, observer les régimes de pouvoir relatif à la colonialité en santé mentale dans la manière dont certaines populations se retrouvent stigmatisées et discriminées : « les schizophrènes », « les autistes », « les suicidaires », « les drogués », « les bipolaires », etc. Nous la retrouvons également dans la manière dont chaque société organise les règles concernant la privation de liberté et de droits, ou dont elle appréhende la question de l’altération du discernement des personnes psychiquement plus fragiles.
Les discours et pratiques de santé mentale ne sont pas neutres. Ils véhiculent des biais propres à nos processus d’appropriation et de (re)production des savoirs et des connaissances, dont les humanitaires peuvent être les messagers, souvent de bonne foi et à leur insu. Nous observons comment nombre de ces discours et pratiques transportent notamment un imaginaire propre au capitalisme néolibéral. Dans cet imaginaire, la personne concernée par un trouble ou, par extension, le « bénéficiaire » d’un projet humanitaire, doit devenir responsable de lui-même (de sa santé mentale, de ses droits, de son insertion sociale…). Pour ce faire, on cherche à le transformer en acteur de son projet et de son parcours, souverain/gouverneur de lui-même, performant, autonome, etc.
Anibal Quijano montre bien comment la cosmologie rationnelle moderne est étroitement liée à la cosmologie coloniale prédatrice : il parle de « cosmologie de l’occupation ». Parce qu’ils sont en permanence en train de fabriquer des projets/programmes et des existants qui ne possèdent aucune stabilité ontologique, les humanitaires « messagers » véhiculent une anthropologie « projective » de l’être au monde. Cela est valable aussi bien pour les opérations humanitaires, qui se fragmentent sur autant de territoires qu’il y a de projets avec leur temporalité propre, que pour les nombreux documents techniques, de positionnement, de capitalisation, de formation qui essaiment les disques durs des « chargés de programmes ». L’action humanitaire dans son ensemble fonctionne dans le cadre de la « cité par projets » décrite par Boltanski et Chiapello[5]Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Gallimard, 1999.. Le secteur SMSPS est organisé par cette anthropologie projective alors que, de surcroît, un certain nombre des activités qu’il propose visent à accorder les subjectivités individuelles à cette manière de se penser au monde (pensée pragmatique, opératoire, en attente d’efficience sur le court terme, de gestion de soi, etc.).
La colonialité de la santé mentale peut ainsi se révéler par une codification des symptômes et la création de nouvelles pathologies plus ajustées à des traitements pharmacologiques et médicaux qui viennent renforcer certains pouvoirs et inégalités sociales (firmes pharmaceutiques, classes sociales aisées qui peuvent se « payer » l’accès aux traitements dans un contexte d’absence de couverture maladie universelle, etc.). Nous l’observons également dans les processus de transformation des rapports aux corps, aux sensations, aux émotions, aux besoins, notamment à travers les thérapies dites de faible intensité (méditation de pleine conscience, premier secours psychologique, etc.). Se développe une véritable économie du bonheur, où celui-ci est transformé en objet désirable que l’on cherche à mesurer, un bonheur véhiculant la triade positivisme, performativité et normativité néolibérale. La colonialité de la santé mentale s’observe à travers une forme d’écrasement culturel par des théories psychologiques qui localisent uniquement les causes des troubles psychologiques à l’intérieur de la personne tout en ignorant les conditions sociopolitiques dans lesquelles vivent les individus et qui peuvent aussi être à l’origine de cette détresse. Ce faisant, cette colonialité redéfinit ce qui relève ou non du réel.
Cette perspective interroge les pratiques d’humanitaires en SMSPS. Un programme de six séances de thérapies comportementales et cognitives (TCC), conçues pour cibler spécifiquement les pensées envahissantes, sera-t-il vraiment efficace pour une femme érythréenne qui ne sait pas comment elle va nourrir sa famille pendant les semaines à venir ? Un traitement par antidépresseurs établi dans le cadre d’un protocole de soins ciblés permettra-t-il d’éradiquer le traumatisme d’origine racial que vivent les femmes rohingyas à Cox’s Bazar au Bangladesh ? Le bien-être psychologique ressenti suite à la mise en place d’une série de séances de désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires (Eye Movement Desentilization and Reprocessing – EMDR en anglais)[6]L’EMDR est un type d’intervention à visée psychothérapeutique reconnu par l’OMS comme étant efficace pour traiter notamment les états de stress post-traumatique. auprès de femmes et de jeunes filles victimes de violences sexuelles contribuera-t-il à augmenter leur protection et leur sécurité au sein de leur société ? Un programme de méditation de pleine conscience sur quatre séances permettra-t-il d’aider les jeunes hommes débarquant aux frontières françaises à surmonter les trappes administratives dans lesquelles ils tomberont en cherchant à obtenir un « statut », après avoir traversé déserts, océans et montagnes ?
Intersectionnalité en santé mentale
Une approche décoloniale en santé mentale consiste à laisser les personnes faisant l’expérience d’un trouble, en lien avec leur communauté d’appartenance, juger de ce qu’elles considèrent comme de la souffrance ou une bonne santé mentale (avec leurs mots, leurs émotions, leurs croyances), plutôt que de laisser les manuels de psychiatrie et de psychologie décider pour elles. Il s’agit notamment d’ouvrir un espace de dialogue sur l’expérience de ces personnes et sur les réponses qui peuvent être collectivement inventées pour soulager leurs épreuves[7]Voir, pour aller plus loin, l’excellent documentaire intitulé Les cornes de la vache, réalisé par François Bierry, qui raconte l’histoire de communautés villageoises au Rwanda pratiquant une … Continue reading. Il s’agit de libérer les histoires, les cultures, la manière même dont sont structurés les enseignements et autres dispositifs de production des savoirs et connaissances qui ont été brutalisés et exploités par le colonialisme. Cette approche permet de nous interroger à nouveau sur les conditions permettant à nos pratiques en SMSPS de faciliter l’accomplissement de vies plus vivables[8]Judith Butler et Frédéric Worms, Le vivable et l’invivable, PUF, 2021.. Pour ce faire, nous pensons qu’il devient nécessaire d’introduire, dans les pratiques humanitaires, une politique et une méthode intersectionnelles.
La notion d’intersectionnalité[9]L’intersectionnalité est une méthode permettant de rendre visible la situation de personnes subissant simultanément plusieurs formes de domination ou de discrimination comme le racisme, le … Continue reading a été forgée par une juriste féministe afro-américaine, Kimberlé Williams Crenshaw, dans une enquête portant sur les violences subies par les femmes de couleur des classes défavorisées aux États-Unis. Cette notion a, depuis, permis d’élargir les combats contre l’écrasement de « soi », contre l’étouffement des libertés par des institutions totalitaires ou de démocratie autoritaire, contre la mise sous contrôle des corps, des fors intérieurs, des désirs et des choix de vie. En SMSPS, mobiliser la méthodologie intersectionnelle nous permet :
- de porter le regard sur les rapports sociaux de genre, de race, de classe, les catégorisations ethno-raciales qui traversent nos pratiques ;
- de rendre visible les biais de connaissances et les rapports de pouvoir en termes de production de connaissances ;
- de mieux saisir l’état de santé des humains dans leur imbrication avec les environnements sociaux, politiques, économiques, etc. ;
- d’appeler à la délibération citoyenne autant sur la définition de ce qui fait trouble que de la réponse pouvant être inventée pour faire face à l’épreuve du trouble ;
- d’appeler à l’application effective de notions universalistes en termes de droits.
Les approches en SMSPS développées en contexte humanitaire pourraient apprendre beaucoup de la « psychologie de la libération[10]Steve Melluish, “Liberation Psychology”, Clinical Psychology Bite-Size, no. 50, June 7, 2017, https://criticalvaluesbasedpracticenetwork.co.uk/liberation-psychology », fondée dans les années 1980 par le militant et psychologue salvadorien Ignacio Martín Baró. Cette approche pointe le fait que la souffrance émerge des expériences et des histoires d’oppression vécues par les individus. Ces derniers ne sont pas appréhendés comme des patients, mais comme des acteurs sociaux potentiels dans leur désir de liberté, valorisant leur propre lignée, leur créativité et leur expérience, plutôt que d’être contraints à une idée eurocentrique et individualiste de la relation à l’autre et de la thérapie[11]Sanah Ahsan, “Holding up the mirror: deconstructing whiteness in clinical psychology”, The Journal of Critical Psychology, Counselling and Psychotherapy, vol. 20, no. 3, pp. 45–55.. La psychologie de la libération cible les causes sociales, culturelles et politiques de la détresse par une action sociale collective et transformative. Comme le précise Simon Gasibirege[12]Simon Gasibirege, « Approche Communautaire en Santé Mentale, Les Guides de la Santé Mentale Communautaire », Programme de Santé Mentale Communautaire (PSMC), Université nationale du Rwanda, … Continue reading, professeur en psychologie au Rwanda, « toute communauté possède en son sein des ressources locales propres pour réagir à l’atteinte de la santé mentale. […] La reconstruction de la santé mentale pour une communauté passe [alors] par une animation appropriée de ses structures de communication et de solidarité[13]Pour aller plus loin, voir le documentaire Réunir les solitudes, réalisé en 2012 au Rwanda par Guillaume Pégon et Élodie Finel avec Handicap International, … Continue reading. »
Des droits de l’Homme mobilisateurs en santé mentale
Appréhender ces enjeux directement dans les projets de SMSPS semble incontournable à condition de renouveler son rapport avec le droit et avec l’éthique. Depuis quarante ans, un nouveau droit à une vie vivable s’est affirmé concernant des individus ou des communautés (femmes, LGBTQI, handicapés, précaires, malades mentaux, ex-colonisés) dotés d’un pouvoir et de capacités d’agir pour mieux aimer, habiter, vivre au-delà de l’assignation à une identité de victime. Ce tournant « capacitaire » a, depuis, été expérimenté sur de multiples scènes d’intervention humanitaire dans le sillon des luttes pour les droits civiques des années 1960. Or, force est de constater que cette pluralité de combats historiques a été peu ou prou cornaquée par les puissances capitalistes, la séquence des luttes pionnières des années de combat se clôturant au moment même où ladite défense des droits de l’Homme se hissait à hauteur de principes universels, répétés à satiété dans un contexte de difficile, voire de non-application dans la vie réelle.
Certes le tournant néolibéral a été prolixe en production de normes, de codes, de conventions internationales et de codicilles additifs à signer, pays par pays. Mais pour quels réels effets au-delà du déclaratif ? La voie est étroite au-delà de l’éthique dite principielle rabâchée par la doxa occidentale. Dans certaines formes de tradithérapie, par exemple, l’obéissance du patient à son « maître » (parfois jusqu’à la flagellation) peut faire partie du dispositif de « soins ». Lorsque sa communauté devient sensible au fait que la personne enchaînée (physiquement ou pharmacologiquement) a des droits, convoquer les droits de l’Homme peut alors avoir un sens concret, en référence notamment à une pratique d’attention à autrui et à sa situation, ce que l’on appelle aujourd’hui une éthique du care[14]Patricia Paperman et Sandra Laugier (dir.), Le souci des autres. Éthique et politique du care, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 2005.. L’universalité des droits est alors posée, non pas en surplomb mais en situation, sans que cela remette en cause l’intérêt des tradithérapies, camps de prières ou autres soins hétérodoxes. C’est cela même que l’on peut aussi nommer décolonialité. Il devient alors pertinent pour les acteurs concernés sur le terrain d’outiller le droit (en termes de plaidoyer ou de jurisprudence) pour des pratiques de SMSPS plus soucieuses des situations d’oppression à la fois cumulatives (intersectionnalité) et abusives (abus de situation de pouvoir). De fait, la diversité des notions largement usitées en santé mentale telles que « décision assistée », « décision substitutive » ou « consentement éclairé » peut participer d’une recherche d’un usage plus adapté aux contextes culturels, et en des termes plus processuels, du couple capacité/incapacité.
Les nouveaux cadres « capacitaires » en santé mentale se référant aux droits de l’Homme peuvent être émancipateurs, à condition qu’ils soient relayés par des contre-pouvoirs in situ, issus des communautés de destin qui apprennent à « faire avec », cette nouvelle matière juridique contraignant, par exemple, les parties prenantes ayant signé des conventions à honorer leurs engagements. Chemin faisant, les sociétés civiles apprennent à manœuvrer le droit en santé mentale afin qu’il devienne un aiguillon mobilisateur visant à rendre les vies plus vivables. Cheminer auprès de mouvements émergents émancipateurs et libérateurs issus des sociétés civiles, à travers des activités de mobilisation citoyenne ou d’entraide communautaire en SMSPS par exemple, est l’un des enjeux majeurs auquel peuvent répondre les ONGI dans le cadre de l’opérationnalisation de l’agenda de la localisation de l’aide humanitaire.