Face au changement climatique, les ONG humanitaires françaises adoptent différents modèles tout en affrontant une double injonction : environnementale et décoloniale. Les outils de gestion qu’elles déploient révèlent trois approches distinctes, nous explique l’auteur. Cette transformation soulève des enjeux d’héritage colonial, mais présente aussi des opportunités d’innovation gestionnaire pour une transition plus juste et systémique.
Le changement climatique anthropique, c’est-à-dire les dérèglements du système Terre liés à l’activité humaine sur notre planète, est aujourd’hui l’un des enjeux majeurs auquel vont être confrontées toutes les sociétés humaines. Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)[1]Valérie Masson-Delmotte, Panmao Zhai, Anna Pirani et al., Climate Change 2021: The Physical Science Basis, IPCC Sixth Assessment Report, Working Group, 9 August 2021, … Continue reading pose ainsi un double constat. D’une part, le système climatique se réchauffe et affecte toutes les populations, en premier lieu les plus vulnérables. D’autre part, le GIEC corrobore l’idée que le modèle gestionnaire standard – qui tend à réduire les organisations à des « agent(s) économiques(s) ayant vocation à maximiser (leurs) profit(s) »[2]Nathalie Lallemand-Stempak et Philippe Eynaud, Petits manuels de la grande transition. Vers une autre gestion, Éditions Les Liens qui libèrent, 2022, p. 18. – peut accroître les vulnérabilités environnementales. Ce double constat est aujourd’hui partagé par de nombreux acteurs qui, depuis l’accord de Paris de 2015[3]Nations unies, Accord de Paris, 12 décembre 2015, https://unfccc.int/sites/default/files/french_paris_agreement.pdf sur le climat, formulent le souhait d’opérer une transition écologique, sociale – voire économique – vers des modèles de sociétés, et donc d’organisations, plus soutenables.
Le secteur des organisations non gouvernementales (ONG) françaises connaît à ce titre une double dynamique. Depuis décembre 2020, treize d’entre elles se sont engagées à réduire de 50 % leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) à l’horizon 2030, actant que « les actions des organisations de solidarité, aussi cruciales soient-elles, peuvent générer des impacts environnementaux et climatiques »[4]Réseau Environnement Humanitaire, Rapport de suivi de la déclaration d’engagement, à année +3 (Déclaration d’engagement des organisations humanitaires sur le climat initiée en décembre … Continue reading. Depuis mars 2022, elles ont été rejointes dans cet engagement par les principaux bailleurs[5]Des bailleurs multilatéraux comme l’Union européenne et ses dispositifs dédiés (notamment ECHO), et bilatéraux comme la France, l’Allemagne, etc. occidentaux de l’aide publique au développement[6]Commission européenne, Déclaration des bailleurs de l’aide humanitaire sur le climat et l’environnement, 7 mars 2022, … Continue reading. Parallèlement, ces organisations déploient, depuis une dizaine d’années, un agenda de localisation de l’aide qui vise « à ramener les acteurs locaux [autorités locales ou société civile] au centre du système »[7]Coordination SUD, La localisation de l’aide. Plus de proximité permet-il d’assurer l’autonomie des projets déployés ?, mars 2020, p. 19, … Continue reading. Il s’accompagne depuis peu d’appels plus globaux à ancrer les enjeux soulevés dans une perspective de décolonisation de l’aide internationale[8]Shannon Paige and Dimitri Kotsiras, Time to Decolonise Aid. Insights and lessons from a global consultation, Peace Direct, 10 May 2021, … Continue reading. Plusieurs organisations[9]Martha Kapazoglou et Yannicke Goris, Décolonisation de l’aide au développement. Partie III – L’avenir, c’est maintenant : des voies viables vers un secteur du développement décolonisé, … Continue reading et auteurs[10]Anna Diaz, Martine Gwana Passa, Carine Magen-Fabregat et al., « Quels chemins vers une aide décolonisée », Humanitaires en Mouvement, n° 26, décembre 2024, … Continue reading montrent ainsi que ce secteur peut encore être porteur, par certains aspects (par exemple dans le financement des organisations dites du Sud global), de legs et d’impensés tirés de l’histoire coloniale occidentale.
« Plusieurs ONG françaises tentent, par l’adoption d’un nouvel outillage gestionnaire, de transformer leur modèle organisationnel pour
le rendre plus soutenable. »
En tant qu’actrices de ce système, les ONG françaises sont donc confrontées, dans leur transition, à une double injonction : une première – environnementale – pèse sur leur modèle organisationnel profondément thermo-industriel[11]Soit un modèle à la fois très énergivore et producteur d’externalités négatives sur l’environnement, comme la production de déchets.. Une seconde injonction – que nous nommons « décoloniale » – interroge les persistances de cette histoire coloniale singulière dans l’architecture moderne de l’aide internationale. Dans ce contexte, plusieurs ONG françaises tentent, par l’adoption d’un nouvel outillage gestionnaire, de transformer leur modèle organisationnel pour le rendre plus soutenable. Quels sont les différents modèles qu’elles proposent, que révèlent les outils dédiés, et quels en sont les paradoxes et les leviers ?
Trois chemins de transition écologique pour les ONG françaises
Nous proposons d’illustrer cette question par notre travail de thèse de doctorat[12]Vincent Pradier, Changement climatique et ONG françaises. Une analyse décoloniale de leur outillage gestionnaire, 2025, à paraître. qui s’appuie sur des études de cas comparatives menées au sein d’ONG françaises de solidarité internationale. L’inscription de ce travail en Convention industrielle de formation par la recherche (CIFRE) au sein de Coordination SUD[13]La plateforme des ONG françaises de solidarité internationale. nous a permis d’étudier cinq ONG françaises[14]ALIMA, Médecins du Monde, Solidarités International, le Gret, le Secours Catholique – Caritas France., et de nous intéresser aux outils de gestion développés en France, au Sénégal et au Burkina Faso pour faire face au changement climatique anthropique. Sur cette base, nous avons construit trois modèles organisationnels types, nous permettant de décrire, pour les ONG concernées, la trajectoire de prise en compte du réchauffement du système climatique, les pratiques de transition écologique mises en oeuvre, et les outils de gestion déployés.
Le premier modèle, qui caractérise plutôt les ONG humanitaires dites d’urgence, s’appuie sur un outillage gestionnaire marqué par une forte dimension instrumentale[15]Soit une fonction pratico-utilitaire. Voir notamment : Ève Chiapello et Patrick Gilbert, Sociologie des outils de gestion. Introduction à l’analyse sociale de l’instrumentation de gestion, La … Continue reading et orienté principalement vers la comptabilisation (et la réduction) de l’empreinte carbone. Il concerne des ONG financées majoritairement par l’aide publique humanitaire, à la fois multilatérale (Direction générale pour la protection civile et les opérations d’aide humanitaire européennes de la Commission européenne – ECHO, etc.) et bilatérale (USA, France, Allemagne, etc.), et disposant d’un modèle organisationnel « internalisé » – soit des « délégations » ou « bureaux pays » rattachés et dépendants d’un même siège social. Dans ce modèle, les organisations, comme ALIMA[16]ALIMA et Climate Action Accelerator, Feuille de route environnementale. ALIMA, face aux enjeux du climat et de l’environnement 2020-2030, 5 avril 2022, … Continue reading, déploient des pratiques articulées autour de stratégies précises, composées de nombreux indicateurs quantitatifs (quantités de combustible utilisées en kWh, tonnes d’équivalent carbone, nombre de kilomètres parcourus par les véhicules, etc.) standardisés (entre trente et soixante en fonction des ONG) et communs à toute l’organisation, quel que soit le pays d’intervention. Ceux-ci permettent d’apprécier rapidement les effets des pratiques sur les trajectoires de décarbonation de l’organisation. Les stratégies s’appuient d’ailleurs généralement sur l’accord de Paris et les recommandations du GIEC[17]Notamment réduire de 50 % l’empreinte carbone organisationnelle à l’horizon 2030.. Et si les problématiques liées à l’adaptation sont mentionnées, elles sont généralement moins présentes que celles liées à l’atténuation, et peu traduites de manière opérationnelle.
Le deuxième modèle, déployé par le GRET[18]Gret, Stratégie climat du Gret, avril 2022, https://gret.org/wp-content/uploads/2022/07/220525_Strategie-CLIMAT-du-Gret_FR.pdf, se caractérise par un outillage gestionnaire à travers lequel l’ONG tente de concilier des pratiques d’atténuation et d’adaptation. Si, dans ce modèle, les ONG disposent aussi d’un système organisationnel internalisé, elles mobilisent des ressources plus diversifiées et moins contraignantes, y compris dans les fonds publics (en particulier celles de l’Agence française de développement). Comme les ONG humanitaires, les outils de gestion s’appuient ici sur une stratégie formalisée. Néanmoins, seule une dizaine d’actions-clés et d’indicateurs dédiés sont fixés par le GRET sur son empreinte carbone, sur la base de sept thématiques identifiées[19]Consommation énergétique, déplacements, déchets, achats, etc.. Ces indicateurs et actions sont par ailleurs adaptables par chaque délégation pays, en fonction des contextes : dans certains cas, les actions porteront davantage sur les enjeux énergétiques ; dans d’autres, plutôt sur la réduction des déchets, ou les déplacements en avion, etc. Enfin, la phase de construction et de validation des plans d’action et des outils de pilotage est aussi plus longue, s’appuyant notamment sur de multiples espaces de concertation dédiés (équipes salariées, bénévoles, personnes ciblées par les projets, etc.). En termes d’objectif, la réduction de 50 % de l’empreinte carbone ne s’applique par de manière globale, mais de manière individuelle. Formulé autrement, dans ce modèle, les ONG peuvent tendre à « renforcer la sobriété de (leurs) activités tout en (se) laissant la possibilité de les développer »[20]Gret, Stratégie climat…, op. cit., p. 7.. En outre, l’adaptation des pratiques aux effets du changement climatique anthropique y est plus présente, à la fois dans la transformation des manières de mener les activités et dans l’engagement de la structure (construction d’un marqueur « transition écologique »).
Enfin, le troisième modèle gestionnaire est caractéristique des pratiques de gestion construites par des ONG peu dépendantes des fonds publics, et qui agissent avec des partenaires, à savoir un modèle organisationnel plutôt externalisé, comme le Secours Catholique – Caritas France (SCCF). Prônant une transition écologique « juste » – concept encore flou, que l’ONG et ses partenaires tentent de définir – le SCCF propose un outillage de gestion coconstruit avec une diversité de parties prenantes (des organisations similaires basées dans une vingtaine de pays d’intervention). Ce faisant, elle déploie concrètement, via des projets ayant pour objectif de réduire les inégalités tout en protégeant l’environnement, des outils de gestion qui intègrent l’enjeu central « d’une responsabilité commune mais différenciée ». Dans cette logique, l’ONG n’a pas de stratégie dédiée à son empreinte carbone sur ses activités à l’international : elle estime en effet que ses partenaires évoluent sur des territoires où l’empreinte carbone par habitant est déjà relativement faible. À l’inverse, ambitionnant de « promouvoir collectivement une vision commune de la transition écologique juste »[21]Agence française de développement, Fiche projet AFD : concevoir et promouvoir une transition écologique juste, décembre 2021, … Continue reading, elle met en oeuvre des projets d’adaptation visant « à renforcer (le) pouvoir d’agir […] des communautés vulnérables » et « formaliser une vision systémique de la transition écologique »[22]Agence française de développement, Fiche projet AFD : concevoir et promouvoir…, op. cit., p. 2.. Pour le SCCF, ces projets de communautés résilientes sont appréhendés comme autant de leviers d’une justice climatique et environnementale qui visent à produire des changements systémiques et structurels durables dans le système de l’aide internationale.
L’utilité des écologies décoloniales pour comprendre la crise de l’humanitaire
Si ces trois modèles illustrent la façon dont les ONG françaises font face, dans leur gestion, à cette injonction environnementale, nos travaux éclairent aussi les héritages coloniaux qui sous-tendent les pratiques déployées. Toutes les ONG observées sont ainsi porteuses, à des degrés variables, de plusieurs formes de colonialité. Celle-ci est comprise par certains auteurs comme « l’articulation planétaire d’un système de pouvoir “occidental” [qui] se fonde sur une infériorisation prétendument naturelle des lieux, des groupes humains, des savoirs et des subjectivités non occidentales »[23]Arturo Escobar et Eduardo Restrepo, « Anthropologies hégémoniques et colonialité », Cahiers des Amériques latines, vol. 62, n° 3, décembre 2009, p. 83-96, 86.. Elle se décline sur différents plans – pouvoir, savoir, être, genre, nature – et se veut, pour les penseurs décoloniaux « le mode de domination le plus général dans le monde actuel »[24]Aníbal Quijano, «Colonialidad y modernidad/racionalidad», Perú Indígena vol. 13, n° 29, 1992, p. 11-20,14, (traduction de l’auteur), … Continue reading, en particulier dans l’architecture internationale.
« Toutes les ONG observées sont ainsi porteuses, à des degrés variables, de plusieurs formes de colonialité. »
À travers notre travail de thèse, nous documentons ces formes de colonialité dans les pratiques de transition écologique observées qui s’articulent aux dynamiques de localisation mises en place par les ONG. Cela se perçoit, par exemple, dans des pratiques d’infériorisation des savoirs non-occidentaux jugés comme illégitimes a priori (colonialité du savoir). Les ONG excluent ainsi parfois dans la construction et la gestion de leurs activités les groupes subalternes – et les connaissances qui sont les leurs –, soit les personnes vulnérables les plus concernées par le changement climatique anthropique. Cela se traduit en outre dans l’occidentalo-centrisme de certains outils de gestion : il en va ainsi, notamment, de la normalisation et de la généralisation de nouveaux « standards » humanitaires qui intègrent, à travers de nombreux indicateurs techniques et instrumentaux, les questions environnementales, mais contribuent à renforcer des dissymétries dans l’aide internationale. Cela se manifeste dans le difficile accès aux financements par les organisations non-occidentales, paradoxalement les premières concernées par le changement climatique anthropique, mais aussi les plus éloignées de ces « standards » internationaux de gestion humanitaire (colonialité du pouvoir). Les contraintes imposées par les bailleurs de fonds publics occidentaux renforcent plus globalement ces formes de colonialité au sein des pratiques des ONG par les effets de normalisation qu’elles induisent. Et l’on ne fera que mentionner les multiples incohérences de gestion dont elles sont porteuses et qui empêchent une réelle transition écologique, notamment dans les financements humanitaires.
Les ONG étudiées ne doivent pas pour autant être réduites à ces formes de colonialité. Nos travaux montrent ainsi une pluralité de pratiques présentes dans les trois modèles décrits. Celles-ci permettent au contraire de s’extraire d’une gestion coloniale et de proposer un outillage alternatif. Certes, il existe des formes plus ou moins institutionnalisées de contournement – voire de ce que l’on pourrait appeler une « falsification des données » – par les équipes déployées sur les territoires, pour les outils de gestion considérés trop normatifs. « Le Blanc, quand il veut un chiffre pour son tableau de bord, on lui trouve », nous a ainsi précisé un responsable salarié burkinabé d’une des ONG observées. Mais la matérialité du changement climatique anthropique permet aussi aux ONG d’innover à de nombreux niveaux. Citons deux exemples éclairants parmi d’autres.
Certaines des ONG sont ainsi devenues actrices de formes d’économies circulaires, notamment en appuyant l’émergence de coopératives locales dans le but de localiser les chaînes d’approvisionnement, de recycler ou de réemployer les déchets, comme le projet Plastik d’ALIMA au Burkina Faso. Si l’intention initiale est ainsi de répondre à un enjeu de soutenabilité environnementale, l’action de l’ONG permet en même temps de renforcer le pouvoir d’agir des communautés impliquées dans le projet. Deuxième exemple : la plupart des ONG mobilisent nombre de savoirs endogènes (dans l’utilisation des matériaux, les techniques agricoles, les systèmes de conservation, etc.) visant, par un dialogue épistémologique horizontal avec la science occidentale, à renforcer l’adaptation des territoires des populations aux effets du changement climatique anthropique. C’est, en particulier, le cas du GRET et du SCCF au Sénégal, qui s’appuient sur les connaissances des coopératives agricoles accompagnées pour renforcer, à travers des pratiques d’agroécologie, la sécurité alimentaire des populations des territoires concernés.
Ainsi, les ONG observées se caractérisent toutes par des formes de « créolisation », voire de pluriversalité de leur outillage gestionnaire dédié à la transition écologique. Ces concepts, tirés en particulier des écologies décoloniales[25]Collectif, Décoloniser le changement climatique, Plurivers, revue d’écologie décoloniale, n° 1, Éditions du Commun, 9 février 2024., sont utiles pour mieux appréhender « les options et les obstacles rencontrés par le dispositif humanitaire pour se connecter à la protection de la vie humaine avec le monde naturel »[26]Extrait de l’appel à contributions du présent dossier d’Alternatives Humanitaires.. Popularisées par des auteurs comme Malcolm Ferdinand ou Arturo Escobar[27]Arturo Escobar, Un autre possible est possible, Éditions Zulma et Jimsaan, 2024, https://www.zulma.fr/wp-content/uploads/EXTRAIT-SITE_ESCOBAR.pdf, ces approches font de « la fracture coloniale, l’enjeu central de la crise écologique, [découlant] du constat que les pollutions, les pertes de biodiversité, de même que le réchauffement climatique sont les traces matérielles de cet habiter colonial de la Terre »[28]Malcom Ferdinand, Une écologie décoloniale. Penser l’écologie depuis le monde caribéen, Éditions du Seuil, 2019, p. 298..
Face à cette double injonction environnementale et décoloniale qui s’accroît, ces nouvelles approches de l’écologie peuvent aider les ONG occidentales à élaborer un chemin de transition qui leur soit propre. À la manière des modèles proposés par les ONG françaises, elles permettent de construire des pratiques visant à réduire simultanément les vulnérabilités environnementales, économiques et sociales. Si les bailleurs publics, par les contraintes qu’ils imposent, ont un rôle déterminant, les ONG ont tout à gagner à réancrer la crise climatique et ses conséquences dans une histoire plus longue, notamment celle de l’histoire coloniale occidentale. Comprendre comment celle-ci a façonné un « habiter colonial »[29]Pour Malcom Ferdinand, « l’habiter colonial » désigne « une conception singulière de l’existence de certains humains sur Terre (les colons), de leurs rapports avec d’autres humains (les … Continue reading peut permettre aux ONG d’être pleinement actrices d’une transition à la fois écologique, climatique, juste, et inclusive.
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